Le mot


Je ne sais pas où mes mots vont atterrir
Ma phrase cherche désespérément
un endroit paisible pour se poser
Mais ce repos paraît bien illusoire!
Le mot ne peut s'assoupir
Que lorsqu'il est vidé de son contenu
Il retrouve alors une seconde vie, en expurgeant la substance qui est en lui.
Condamnée à errer, il vogue, poussé par une marée dévastatrice
Qui lui fait perdre une partie de son sens
Pour ne laisser filtrer que la guirlande de notes qui se dessine à travers lui
Des ramifications se dressent, pour nous rappeler que le mot ,
C'est d'abord de la musique « Non impedias musicam »
Une caresse qui peut trouver des prolongements
Dans un violon, ; en lui arrachant des sons de velours,
Mais Comment lui redonner son éclat , sa valeur primitive
Son expression lumineuse  ?.
Le mot s'est usé, à force d'avoir été abondamment prononcé
Il a les ailes rognées pour avoir trop servi
Emmuré dans sa carapace, il cherche à conquérir les espaces de liberté
En ricochant dans des parterres fleuris
Sous les yeux ébahis des abeilles qui ont abandonné leur dard
Pour participer au spectacle grandiose et surnaturel
de cette nature ensoleillée et enfiévrée

Émile Lelouch